7 salles, 7 écrans.
Le temps de deux soirées, le 102 se transforme en Multiplex : 7 salles, 7 écrans, 7 projecteurs. Des projections pour vingt spectateurs sur canapés ou pour huit entourés par les amplis et les instruments de musiques du local de répèt… mais à chaque salle son grand écran.
10 films et performances.
Vous avez bien lu ; dix films différents, pour tous les goûts, dans tous les formats. Deux performances, dignes des plus grands westerns pour l’une et des meilleurs combats intersidéraux pour l’autre, enfin un Guy Maddin au 102, un film au téléphone portable dans les nuits de Londres, un voyage musical frigorifiant dans un port d’Alaska, une réflexion sur la manière de filmer son ennemi par le talentueux réalisateur israélien Avi Mograbi, une splendeur en noir et blanc de Phillipe Garrel, une plongée dans l’appartement-monde d’un autiste bricoleur (ça faisait longtemps…), le retour du body-killer Bishop alias Charles Bronson, un documentaire de 1947 sur les futures technologies de communication des années 2000… et des surprises.
3 séances : 20h / 22h30 / Minuit.
Trois séances pour s’en mettre plein les mirettes et regarder des films jusqu’à plus soif : la première à 20h, la deuxième à 22h30 et la dernière à minuit. On ne paie pas au film mais pour l’ensemble de la soirée. Alors si vous venez pour un, deux ou trois films c’est le même prix : 2, 4, 5 ou 8 euros au choix.
Dès 18h30, profitons du jardin pour déguster des crêpes, des gaufres, des frites, du pop-corn et boire tranquillement l’apéro à l’ombre de la glycine.
LES FILMS A L’AFFICHE DU VENDREDI :
Matthew’s laws de Marc Schmidt [Pays-Bas / 2012 / vidéo / 72’]
Matthew vit dans un monde différent. Son appartement surchargé et à moitié détruit est son univers. Il ne sort presque jamais, possède un calendrier qu’il est le seul à comprendre et répare sans fin son domicile. Il est maladroit, inquiet et timide, mais il accepte d’être filmé par son ami d’enfance devenu cinéaste. Sans barrière, même lorsqu’il entre dans ses colères ou ses phases de désespoir incontrôlables. Car Matthew sait que ce sera peut-être l’unique façon de se dévoiler au monde tel qu’il est. Ce monde qu’il n’arrive pas à intégrer et qui peine à gérer son autisme, qui ne comprend pas ses lois.
Le révélateur de Philippe Garrel [France / 1968 / dvd / 62’]
Un couple avec un enfant fuyant une menace invisible à travers des paysages désolés. La route, la forêt, une maison abandonnée peut-être : autant de lieux improbables pour reprendre souffle, habiter un instant l’espace inhospitalier. C’est un film muet tourné en noir et blanc et en Allemagne après le joli mois de mai, un ovni cinématographique, un poème symbolique, un rêve expressionniste. Le révélateur révèle à chacun ce qu’il veut y voir : la lumière éblouissante qui apparaît sur la pellicule muette, la trace des chemins perdus où sont passées les familles traquées par la violence, la révolte de l’enfant qui bricole son propre chemin.
Dutch Harbor de Laura Moya et Barden King [USA / 1997 / 35mm / 73’]
Dutch Harbor, port vital et suractif des îles Aléoutiennes, entre l’Alaska et le néant, balayé par des vents violents et des vagues tranchantes ; une ultime frontière pour les desperados, les insomniaques du rêve américain. De ce fatras de glace et de ces hommes taillés au burin, Laura Moya et Barden King ont ramené un film poétique et psychédélique, un vertigineux trip contemplatif accompagné d’une musique somptueuse du gratin du rock underground américain : Will Oldham, Jim O’Rourke, David Grubbs, etc.
Winnipeg mon amour de Guy Maddin [Canada / 2009 / 35mm / 79’]
« L’histoire est faite de vérités qui deviennent à la longue des mensonges et la mythologie est faite de mensonges qui deviennent à la longue des vérités » (Jean Cocteau). Winnipeg : ville la plus froide au monde, ville des somnambules, des magnétiseurs et des séances de spiritisme, ville somnolente, habitée par les esprits et les joueurs de hockey. Guy Maddin rend hommage à sa ville natale, berceau de sa création, omniprésente dans sa filmographie. Il esquisse un portrait décalé de ce lieu atypique et de ses habitants en nous proposant un voyage dans le tortueux labyrinthe de ses souvenirs les plus intimes.
Comment j’ai appris à surmonter ma peur et à aimer Ariel Sharon d’Avi Mograbi [Israël / 1996 / vidéo / 61’]
Dans un moment de folie propre à son cinéma, Avi Mograbi en vient à danser en rond devant un pathétique concert de soutien à la droite ultra-nationaliste israélienne. C’est le clou du spectacle. Nous sommes en 1996, et Ariel Sharon, dont le souvenir hante toujours les massacres de Sabra et Chatila, se présente aux élections législatives. Mograbi, dont les convictions contre l’occupation de la Palestine et le déni historique de son pays sont profondes, veut faire un film sur le Monstre Sharon. Mais le film raconte le lent processus de séduction opéré par le politicien Sharon. Tour à tour, Mograbi l’évoque comme sympathique, amical, plein d’humour… Tombé sous son charme charismatique, Mograbi nous rappelle que le pire dans la vie comme en politique vient de personnes humaines, faites de chair et d’os et que la terreur peut se cacher derrière les formes de politesse, les bons sourires et les tapes dans le dos.
People I could have been and maybe i am de Boris Gerrets [Pays-Bas / 2010 / téléphone portable / 54’]
« Peut-on réaliser un film réussi avec un téléphone portable en 2011 ? » équivaut à se demander si on peut fêter ses trente ans trente fois. Ici Boris Gerrets rencontre aléatoirement, avec sa petite caméra, des individus nyctalopes dans les rues de Londres. Le film raconte l’approfondissement de ses rencontres, avec Steve le junkie, ou encore cette femme brésilienne, Sandrine, dont il tombe amoureux. Une déambulation très personnelle, au plus proche de ses personnages mais jamais voyeuse. Comme quoi l’outil ne fait pas le mobile.
Télévision, œil de demain de J.K Raymond-Millet [France / 1947 / 16mm / 20’]
Une rareté de 1947, dénichée par nos amis de Monoquini. Ou comment imagine-t-on après guerre les utilisations et applications de la télévision dans le futur.
Politics of perception de Kirk Tougas [USA / 1973 / 16mm / 33’]
Comment à partir d’une bande annonce avec Charles Bronson, Kirk Tougas nous montre que la pellicule, et donc le cinéma, sont bien vivants. Que devient notre perception face à la répétition des images ? Que deviennent les images lorsqu’on les duplique à l’infini ?
Stromboli main gauche, performance de Riojim [France / 2 projecteurs 16mm / 30’]
Le noir battement des obturateurs et des îles qui n’ont pas encore reçu leur nom.
Atalaku de Dieudo Hamadi [République Démocratique du Congo / 2013 / vidéo / 60’]
L’élection présidentielle de 2011 fut la deuxième élection libre seulement, depuis l’indépendance de la République Démocratique du Congo en 1960. Gaylor, pasteur sans-le-sou (comme une majorité des neuf millions d’habitants de Kinshasa) se métamorphose en atalaku, « crieur » en lingala. Il fait affaire avec le député le plus offrant dont il assure la publicité dans la rue et pour qui il déniche des musiciens qui composeront la chanson de sa campagne. Atalaku n’aurait sans doute pu être tourné par un non-Congolais, tant il semble faire corps avec ceux qu’il filme – le réalisateur est parfois sommé de filmer tel bourrage d’urnes, et la foule trop dense s’écarte à son passage, confusément convaincue qu’il faut un témoin.